Laisse faire, tu ne comprendras pas de toute façon

Même si je prenais du temps pour te l’expliquer, tu ne comprendras pas !

Combien de fois, comme frère, tu as dis ça à ta soeur, quand t’étais plus jeune ?

Est-ce que tu as déjà refuser de lui partager tes jouets ?

Les rares fois ou elle a pu participer à tes projets, quand elle t’as donné un coup de main pour construire ton méga village de Lego, je suis pas mal certain que tu n’en as jamais parlé à tes chums de gars.

Pour te “protéger” de l’univers féminin, pour ne pas que tu deviennes gai, on t’as appris qu’il fallait jouer avec des camions, des petits soldats, des voitures et surtout éviter tout ce qui est rose.

Tu n’as jamais eu à te pratiquer à faire la cuisine, à changer des vêtements ni à faire des coiffures. On t’a placé dans un rôle de bâtisseur, de gestionnaire, de pionnier. Un monde plein de possibilités et où l’échec est inexistant. À l’école, tant que tu passais tes cours, tu pouvais aller au sport ou jouer avec des amis. Ta soeur, elle était privée de sortie cinéma si elle avait en bas de 80%.

Quand t’es arrivé au secondaire, on a commencé à t’exposer à la sexualité, tes jeux vidéos avaient des superhéroines avec des grosses poitrines sous une maigre armure et sur les isoloirs des toilettes de la poly, il y avait des gros pénis gravés avec un couteau avec “suce-moi” écris en dessous.

Les filles autour de toi ont commencé à se faire harceler pour leurs choix vestimentaires et à se faire dire d’attendre à la fin du cours pour aller à la toilette ! Leurs cours de choix de carrière les destinaient déjà à être mères, autant au travail qu’à la maison, comme infirmière, esthéticienne, psychologue, travailleuse sociale. Parce qu’une fille qui n’a jamais appris à faire des ponts en Lego n’en fera jamais des vrais non plus.

Alors que toi, c’était déjà clair que tu allais devenir travailleur de la construction, investisseur, programmeur, ingénieur, comptable … Bref, la même chose que tu faisais déjà comme enfant, bâtir, gérer, contrôler.

Ce qu’on ne t’a pas dit, c’est qu’en plus, tu allais aussi pouvoir continuer à penser que les femmes ne comprendront pas ce que tu fais de toute façon, que tu refuserais encore de partager tes jouets et que tu n’aurais jamais à parler de leurs coup de main pour terminer tes projets à tes collègues ! On ne te l’a jamais dit, parce que le système est déjà fait pour nous, les gars. Ça s’appelle le patriarcat.

Le 8 mars, c’est une journée pour faire un effort de plus à reconnaître notre parcours de vie parsemé de misogynie (et d’homophobie, ça vient souvent ensemble) et mettre nos soeurs de l’avant, reconnaître leurs contributions et nos mauvais coups et accepter que bien souvent, elles avaient déjà compris bien avant nous.